Après l’accord sur le financement des pertes et dommages, quels enjeux pour la COP28?

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Après l’accord sur le financement des pertes et dommages, quels enjeux pour la COP28  ? ©ONU

La 28e Conférence des parties des Nations unies sur les changements climatiques (COP28) sera sans doute l’une des plus importantes de l’histoire après la COP21 de 2015 en France. Le rendez-vous de Dubaï s’ouvre le 30 novembre prochain avec deux sujets phares : le bilan mondial de l’Accord de Paris et la finalisation du débat sur le fonds des «  pertes et dommages  ». Objectif, permettre un nouveau départ dans les relations entre le Nord et le Sud pour contrer ensemble le dérèglement climatique.

La 28e Conférence des parties des Nations unies sur les changements climatiques (COP28) s’ouvre ce jeudi 30 novembre 2023 aux Émirats arabes unis (EAU). Durant 12 jours de débat et de négociations, les représentants de 196 États et des plus hautes organisations internationales telles que l’Union européenne (UE) se prêtent à nouveau à ce jeu décisif pour l’avenir de la planète. L’enjeu est doublement majeur pour cette édition. D’abord parce que le premier Bilan mondial (Global Stocktake), visant à évaluer l’Accord de Paris adopté lors de la COP21 en 2015, y sera présenté pour une validation universelle. Ensuite, parce que les participants de Dubaï achèveront les discussions sur les détails du fonds pour les pertes et dommages entériné en novembre 2022 dans le cadre de la COP27 en Égypte.

Au sujet de l’Accord de Paris, il sera question d’examiner en profondeur sa mise en œuvre par les 174 signataires parmi lesquels l’Afrique du Sud, la Namibie, l’Algérie, le Bénin, le Botswana, le Burundi, le Burkina Faso, le Cameroun ou encore la Côte d’Ivoire, pour ne citer que ces pays africains. En rappel, ce traité international recommande de « maintenir l’augmentation de la température mondiale en deçà de 2 degrés Celsius par rapport aux niveaux préindustriels et à poursuivre les efforts pour limiter encore davantage l’augmentation de la température à 1,5 degré Celsius ». Cette démarche devrait permettre par exemple d’éviter des vagues de chaleur et des précipitations plus fréquentes et plus graves.

Où en est l’Accord de Paris ?

Or, huit ans après le rendez-vous la COP française, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec) estime que le rythme actuel nous mène tout droit vers +3 degrés Celsius à la fin du siècle en cours. En effet, la transition énergétique est la solution universelle préconisée par les analystes au profit des énergies renouvelables. Sauf que bon nombre de pays ne sont pas prêts de renoncer au charbon, au pétrole et au gaz qui accentuent le réchauffement climatique. Et c’est là le principal blocage de l’Accord de Paris. Sur les cinq continents, les hydrocarbures dictent encore leur loi avec des niveaux de pollution toujours plus élevés.

Le Sénégal par exemple n’envisage pas de tourner le dos à son gaz tandis que la République démocratique du Congo (RDC) exploite à vive allure son potentiel minier. L’Allemagne championne industrielle de l’Europe — qui a une vaste ambition de neutralité carbone d’ici à 2030, a quand même réactivé jusqu’à 12 centrales à charbon au troisième trimestre de 2022 « pour faire face à la crise énergétique » exacerbée par la guerre en Ukraine. Un schéma qui sape les avancées de Glasgow et ne plait pas du tout aux négociateurs de la prochaine COP28. Le premier Bilan mondial ne sera donc pas une partie de plaisir pour toutes les délégations, surtout que le royaume hôte est lui-même critiqué pour l’extraction pétrolière.

La COP de la transition énergétique ?

Toutefois, certaines nations ont investi massivement dans les centrales solaires et hydroélectriques depuis 2015. Leurs efforts dans la diversification du mix électrique devraient être soulignés lors des assises de Dubaï dans le but d’inciter les retardataires à suivre le mouvement. Dans son rapport intitulé Global Energy Architecture Performance Index, le Forum économique mondial classe en tête l’Éthiopie (94 %) où se poursuit la construction controversée du plus grand barrage du continent, l’Islande (90 %), le Kenya (86 %), le Népal (84 %) ainsi que le Paraguay (80 %).

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À noter également que les États-Unis d’Amérique qui génèrent 15 % des émissions de gaz à effet de serre (GES) — en tant que première puissance économique, s’étaient retirés de l’Accord de Paris sous l’impulsion de Donald Trump en 2017 avant de le réintégrer en 2021 sous l’ère Joe Biden. La voix de John Kerry, l’envoyé spécial américain pour le climat devrait donc peser dans les négociations, notamment celles portant sur la géopolitique de l’hydrogène vert mais davantage sur le nouvel ordre économique mondial envisagé pour financer les recommandations ambitieuses de l’Accord de Paris sur le climat.

Le sempiternel dossier du financement climatique

La COP27 en Égypte a permis d’avancer sur la question du financement climatique avec à la clé la création du fonds pour les pertes et dommages climatiques pour les pays du sud dont la plupart sont africains. Le rendez-vous de Sharm-el-Sheikh s’était donc refermé avec pour engagement d’élaborer les détails de ce mécanisme financier aux Émirats arabes unis. Concrètement, les 197 parties de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC) devront impérativement s’accorder sur le montant de la nouvelle cagnotte, qui le financera et à hauteur de combien. Une équation difficile quand on sait que même le choix de la Banque mondiale pour l’abriter provisoirement a été fortement contesté par les pays du Sud global. D’ailleurs, l’institution basée à Washington D.C n’est toujours pas parvenu à se réformer  pour répondre équitablement aux défis d’un nouvel ordre économique mondial.

Il y a aussi des revendications qui ne sont pas des moindres et suscitent un vif intérêt. C’est le cas de la France pour qui il n’est pas question que la Chine et les pays du Golfe (Arabie Saoudite et Qatar, entre autres) échappent au nouveau fonds en raison de leurs empreintes carbone élevées. Mais tout cela ne saurait être exploré sans que l’entente de Copenhague ne resurgisse à Dubaï. En effet, le débat sur la finance climatique mondial part de la COP15 que le Danemark a accueillie en 2009. Les États s’étaient engagés à mobiliser 100 milliards de dollars par an pour « aider les pays en développement à réduire graduellement leurs émissions de gaz à effet de serre» d’ici à 2030.

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Une promesse qui n’a pas vraiment été respectée à ce jour. En 2020 par exemple, les contributions étaient de l’ordre de 83 milliards, selon l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). Entre-temps, les besoins de financement ont considérablement augmenté au regard des conséquences énergétiques de la guerre en Ukraine, des catastrophes naturelles et de la poussée inflationniste, sur l’ensemble du globe terrestre. Face à ces enjeux internationaux, les négociateurs climatiques n’auront donc pas d’autre choix que de trouver des compromis à tous les points de friction, du 30 novembre au 12 décembre prochain.

Benoit-Ivan Wansi

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